Mis à part une incursion ancienne dans l’histoire administrative de l’État pontifical au crépuscule du Risorgimento, assortie d’une expérimentation de la démarche prosopographique (portant sur le corps professoral de l’université de Bologne à la même époque), les recherches que François Gasnault a reprises depuis une quinzaine d’années, après trois décennies absorbées par la direction de centres d’archives, ressortissent toutes de l’anthropologie historique des pratiques culturelles, pour l’essentiel en France, tant urbaine que rurale, au XIXe et au XXe siècles. S’inscrivant dans le sillage des travaux de Maurice Agulhon sur les sociabilités bourgeoise, ouvrière ou paysanne, et de ceux de Jean-Michel Guilcher sur la tradition des danses sociales, elles questionnent le double regard des milieux les mieux dotés en capital économique et/ou culturel sur les aptitudes artistiques des classes populaires, leur degré de soumission aux modèles savants et leur autonomie en matière de création : regard tantôt surplombant et fortement dépréciateur, tantôt empreint de fascination et enclin à l’idéalisation au nom d’une connivence surjouée.
La dansomanie parisienne des décennies centrales du XIXe siècle a constitué le premier terrain d’étude de cette dialectique de l’exaltation et de la relégation, qui opposait avant qu’ils ne convergent policiers et publicistes.
Son observation s’est ensuite portée – et s’exerce toujours – sur celles et ceux, folkloristes, militants de l’éducation populaire, animateurs socio-culturels, chercheurs statutaires, plus récemment musiciens, souvent investis de responsabilités associatives, qui ont pratiqué ou pratiquent encore la collecte, l’interprétation et/ou la diffusion des musiques et des danses supposées constituer une part essentielle du patrimoine culturel immatériel des sociétés paysannes.
Combinant l’enquête ethnographique en immersion avec le dépouillement systématique de fonds d’archives publiques et privées, il étudie en particulier les présupposés idéologiques fort changeants d’une démarche qui n’a cessé de se relancer de la génération romantique à celle du folk music revival, comme les blocages récurrents qui surgissent au stade de la restitution selon les canons académiques.
C’est du reste en partie pour les conjurer qu'il s'est lancé, avec Marie-Barbara Le Gonidec, dans l’aventure du site Les Réveillées, qui rend accessibles en les éditorialisant les données sonores, photographiques et textuelles réunies pendant près d’un demi-siècle (1939-1984) par les fondatrices de l’ethnomusicologie du domaine français, Claudie Marcel-Dubois et Maguy Pichonnet-Andral.
Terrains
Ethnographie des associations de musiques et danses traditionnelles du domaine français
Activités/CV
2013-2024 : mise à la disposition du CNRS par le ministère de la Culture pour assurer successivement les fonctions de
chargé de mission pour la recherche à l'Institut interdisciplinaire d'anthropologie du contemporain, équipe LAHIC / UMR 8177 – CNRS/EHESS (2013-2019)
chargé de recherche et de documentation au laboratoire InVisu, UAR 3103 – CNRS-INHA (2019-2024)
2012-2013 : chef du centre historique des archives au Service historique de la Défense
2009-2012 : inspecteur général des Archives (direction des Archives de France), puis inspecteur des Patrimoines (direction générale des Patrimoines)
2003-2009 : directeur des Archives départementales des Bouches-du-Rhône
1996-2003 : directeur des Archives de Paris
1989-1996 : responsable du Service des Archives économiques et financières (ministères de l’Économie, des Finances et du Budget)
1985-1989 : conservateur à la Direction des Archives de France
2022 (avec Christian Hottin) : "Promouvoir le patrimoine ethnologique : plus de trente années d’implication chartiste (1989-2021)", Bibliothèque de l’École des Chartes, n°176, "L’École des Chartes : un portrait intellectuel, XXe-XXIe siècles", p. 245-261. Texte repris en 2023 dans Bérose-Encyclopédie internationale des histoires de l’anthropologie, avec un titre légèrement modifié ("Promouvoir le patrimoine ethnologique. Drôle de cause pour les archivistes français (1989-2021)")
2014 : "Les rapports entre la direction de la musique et les associations de musiques et danses traditionnelles : un processus de légitimation inabouti (années 1970 – années 1990)", Carnet de recherche du séminaire sur la démocratisation culturelle organisé par le comité d'histoire du ministère de la Culture
2001 : La cattedra, l’altare, la nazione : carriere universitarie nell’Ateneo di Bologna 1803-1859, Bologne, CLUEB
1986 : Guinguettes et lorettes : bals publics et danse sociale à Paris de 1830 à 1870, Paris, Aubier, collection historique
1984 : "La réglementation des universités pontificales au XIXe siècle", Mélanges de l’École française de Rome, t. 96, 1, p. 1777-237 (Réformes et restaurations : les avatars du grand projet zelante, 1815-1834), et 2, p. 1105-1168 (Pie IX et le monopole universitaire).