Publié le 8 septembre 2023–Mis à jour le 12 septembre 2023
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Les bandes criminelles au Moyen Âge
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Article "Les bandes criminelles au Moyen Âge", rédigé par Valérie Toureille (professeure à CY Cergy Paris Université et chercheure à Héritages), paru dans Histoire magazine, n° 13, juillet-août 2023
Le phénomène des organisations criminelles n’est pas propre à notre époque. Au Moyen Âge, les bandes criminelles étaient sans doute plus modestes quant à leur ambition, mais leur constitution reposait sur les mêmes fondements : des hommes (et des femmes) soudés par le silence, des réseaux de voleurs et de recéleurs, le goût de la transgression et celui de la violence. Et leur étude se heurte aux mêmes difficultés. L’organisation criminelle, parce qu’elle agit dans l’ombre, laisse peu de traces et utilise des codes de reconnaissance connus d’elle seule. L’historien doit par ailleurs se méfier de la propension qu’ont certains juges à voir une organisation là où ne se trouve qu’une bande informelle, parce qu’elle valorise leur rôle et permet des développements théoriques. Les sources les présentent comme des contre-sociétés du crime répondant aux modèles institutionnels en usage, allant même jusqu’à mimer la monarchie ou la hiérarchie des corporations, formées de maîtres et d’apprentis. Mais, en la matière, l’univers urbain et le monde de la campagne ne produisent pas les mêmes comportements. Les larrons ancrés dans le terreau urbain sont, d’une certaine façon, plus visibles : ils fréquentent la taverne et les bordels, trafiquent avec des commerçants, qui peuvent avoir pignon sur rue et leur servir de recéleurs. Quant aux brigands qui sévissent dans les campagnes, rançonnent les villages et attaquent les voyageurs, ils obéissent à d’autres logiques.
La bande criminelle la plus célèbre de la fin du Moyen Âge est la compagnie de la Coquille, parce que François Villon, qui n’en était pas membre, mais la connaissait bien, la cite à plusieurs reprises dans ses poèmes.
« Les interrogatoires se succèdent pendant deux mois, qui donnent tour à tour la parole à deux barbiers, une prostituée, un chaussetier, un tailleur de pierre et un maréchal-ferrant. Ceux-là ont déposé sous serment, révélant pour certains leurs liens plus ou moins troubles avec des Coquillards….»
Mais ce que nous savons d’elle tient pour l’essentiel aux feuillets d’un cahier d’une quinzaine de pages aujourd’hui conservé aux archives départementales de la Côte d’Or, d’un procès tenu à Dijon entre octobre et décembre 1455, dont l’instruction fut conduite par le procureur de la ville, Jean Rabustel. La procédure ouverte devant le tribunal du Grand échevinage de Dijon est intervenue à l’issue d’une série de plaintes, venues alimenter la mairie durant plusieurs années. Il est évident que, pour le procureur de Dijon, l’affaire lui permettait d’affirmer, aux yeux du duc de Bourgogne, l’autorité de la cour échevinale et sa propre énergie à combattre le crime.
Dans ce numéro, Valérie Toureille a également publié un article sur la bataille d'Azincourt.